Version initiale de notes prises le 1à août sur la guerre de Géorgie ; la version finale est quasiment identique.

Dimanche 10 août 2008

  Qu’est-ce qui s’est passé, dans la nuit de jeudi à vendredi ?
  Les chars, les troupes, l’artillerie, se sont approchés à portée de tir.
  L’ordre a été donné de viser.
  Ils ont visé.
  Ils ont appliqué les leçons de trigonométrie et de balistique apprises à l’école.
  Ils ont obéi.
  Le dernier ordre a été donné et on a déclenché le tir et on l’a poursuivi dans l’exaltation des coups, au son des canons comme on dit, et dans la coordination des gestes, tous soudés dans le mouvement, chacun attentif à faire ce qu’il doit dans la continuité du suivant et à bonne cadence pour ne pas gêner le suivant, les chefs vérifiant à la jumelle de nuit pour rectifier, un peu plus haut, un peu plus bas.
  Ils tiraient sur Tskhinvali, la capitale de la province de l’Ossétie du sud.
  Parce que, disent-ils, cette province fait partie de leur pays.
  Donc ils ont tiré sur des compatriotes.
  Comment feront-ils, ensuite, avec ces personnes, avec ces autres eux-mêmes, cette partie de leur propre peuple qu’ils reprochent avec indignation à leur ennemi de vouloir leur arracher ?
  À supposer qu’ils puissent revenir sur ces terres comme si de rien n’était et bavarder démocratie, concertation, sciences et culture, que sais-je ?
  Ils ont tiré sur leurs compatriotes au mépris des lois de la guerre, bien sûr.
  Nous aurons le concert des démocrates et des défenseurs de l’État de droit, discours préparés par le silence et l’absence de photos en provenance de Tskhinvali, l’abondance de photos et de reportages sur Gori.
  Tirer sur des populations civiles : crime de guerre au sens de l’article 3 de la quatrième convention de Genève, "relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre" du 12 août 1949.
  Le protocole additionnel I du 8 juin 1977 est encore plus clair. Son article 57, exactement intitulé "Précautions dans l’attaque" s’adresse "ceux qui préparent ou décident une attaque". Vous qui atteignez une cible dans un cercle de dix mètres à quelques kilomètres de distance, savez-vous ce qu’est un civil ?

Sur la guerre de Géorgie, lire aussi :
Vendredi 8 août 2008 - On ne peut mener un tel assaut, et ainsi, que contre ce qui est déjà perdu
Samedi 9 août 2008 - On n’a pas le droit de se lancer dans une bataille qu’on a toutes les raisons de perdre

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