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La crise alimentaire et la crise (4) - oligarchies alliées, violences, non violences

mercredi 6 janvier 2010, par Laurent Grisel (Date de rédaction antérieure : 20 juillet 2008).


Version initiale des notes prises le 20 juillet d’après les exposés de Marcel Mazoyer. Dans la version finale j’ai enlevé quelques insultes à moi-même adressées, et autres modifications mineures. La conclusion est identique.

Vendredi 20 juillet 2008

  Suite et fin de l’intervention de Marcel Mazoyer.
  Problème posé : il y a deux puissances auxquelles il faut enlever leur puissance car elles sont aveugles aux peuples et au monde : financière, grande foncière - lesquelles sont alliées.
  Il le dit : Les paysans sans terre d’Ukraine ou du Brésil (...) sont ruinés par l’alliance du latifundisme et du capitalisme financier.
  Pouvoir latifundiaire, nous le pensons féodal, archaïque. Capital financier, nous nous le représentons moderne, chic, mobile, à la vitesse de la lumière. Mais ils sont faits l’un pour l’autre, mieux : se reconnaissant réciproquement. Au point que le capital financier n’a rien de plus pressé que de se transformer en latifundiaire ; les achats de terres immenses par les riches, par Daewoo à Madagascar, etc.
  Capitalistes financiers et latifundiaires alliés comme larrons en foire dans les négociations à l’OMC.
  Les pays du groupe de Cairns (Afrique du Sud, Argentine, Australie, Bolivie, Brésil, Canada, Chili, Colombie, Costa-Rica, Guatémala, Indonésie, Malaisie, Nouvelle-Zélande, Paraguay, Philippines, Thaïlande, Uruguay) se prononcent dans les négociations à l’OMC contre le protectionnisme européen notamment, et souhaitent une baisse des barrières douanières pour pouvoir exporter leurs produits et continuer de soutenir leurs agriculteurs. Ils sont contre les politiques de subventions pratiquées aux États-unis et en Europe car elles aident à maintenir les prix aux niveaux le plus bas, ce qui crée une concurrence qui leur est néfaste sur les marchés internationaux. Les pays en développement les rejoignent sur cet aspect, mais pour des raisons différentes. Les pays du groupe de Cairns sont des pays agro-exportateurs qui souhaitent bénéficier du libre-échange. Ils traduisent pour une part d’entre eux l’alliance du latifundisme et du capitalisme financier.
  Cette alliance à l’œuvre probablement dans le compromis brésilien. Alors que la faim tue au Brésil, le pays exporte en grande quantité. La seule solution est de faire la réforme agraire comme Lula l’avait promis dans sa campagne présidentielle.
  Lula, l’ancien ouvrier qui ne comprend rien au monde agricole ?
  Lula, le social-démocrate qui parce qu’il est parvenu au pouvoir se croit assez fort pour s’imposer à ceux qu’il croit être ses alliés et leur imposer son calendrier ? Voire, croire qu’ils sont alliés dans le développement du pays.
  En fait, alliés dans la destruction de la paysannerie, dans la production de pauvreté, de faim, de mort.
  Alliance scellée sur ces mécanisme et assumée et trouvant ses bonnes raisons, dès lors qu’on se balade dans le monde entier pour ouvrir des marchés à l’export pour ses prix compétitifs. Obtenus par salaires sous-évalués, et ces salaires possibles parce que le prix de nourrissage des bras inférieur à ce qui permettrait aux paysans de vivre.
  La presse économique a raison de rapprocher dans un seul acronyme – BRIC – Brésil, Russie, Inde, Chine – la dictature communiste chinoise et le Brésil social-démocrate.
  Crétin ! Abusé ! Abusé consentant ! C’est seulement maintenant, lisant Mazoyer, que tu te rends compte de l’importance de la réforme agraire.

  N’oubliez pas que les alliés [après la seconde guerre mondiale] - je ne parle pas seulement des Russes à l’est, mais des alliés occidentaux – ont fait la réforme agraire parce qu’ils avaient très bien compris que le fascisme était lié à un certain type de latifundisme. Les gouvernements bourgeois l’ont fait en Italie du sud, parce que le fascisme italien était né dans les latifundia ; ils l’ont fait au Japon, à Taiwan, en Corée du sud etc. Lénine disait : « la réforme agraire, c’est une réforme démocratique bourgeoise ». Démocratique parce qu’on distribue largement la propriété aux paysans. Bourgeoise, parce qu’on maintient la bourgeoisie et la propriété bourgeoise.
  Mais nous ne sommes plus en 1945. Précisément le monde de 1945 s’est écroulé une première fois dans les années 1980 en laissant la main aux oligarchies financières, il s’écroule une seconde fois en ce moment même.

  M. Mazoyer souhaite que l’OMC, que la FAO, fassent le contraire de ce pour quoi ils ont été créés : qu’ils autorisent les pays, ne serait-ce que les pays pauvres, à avoir une « vraie politique agricole et de sécurité alimentaire ».
  Pourquoi ces instruments du capital financier laisseraient-ils faire ça ?
  On doit faire de leur actuelle faillite intellectuelle une défaite politique et les remplacer par de l’entièrement neuf. On doit imaginer quelles règles et institutions internationales accompagneront les réformes agraires, les nouvelles révolutions vertes.

  Il connaît l’histoire. Il voit la violence.
  Il cite le Zimbabwe. Un pays comme le Zimbabwe, bien ou mal gouverné, ne peut pas faire la réforme agraire de manière pacifique. Il lui faut une vraie guerre civile. Il faut que les paysans sans terre, et les paysans pauvres tuent les propriétaires et les entrepreneurs capitalistes.
  Bon sang ! Mais quelle guerre civile produit des paysans instruits et habiles. Elle ne produit au mieux, si elle est conduite rapidement et avec succès, donc d’une main de fer, que des hommes capables de diriger d’une main de fer – la guerre même civile produit des hommes de guerre et la seule promesse qu’elle puisse faire et tenir c’est de poursuivre la guerre dans la paix.

  Il imagine une bourgeoisie intelligente qui comprendrait que ce qui bloque le capitalisme contemporain, c’est le pouvoir d’achat. On lui expliquerait, elle comprendrait qu’il faut protéger et augmenter les revenus agricoles, donner du pouvoir d’achat à ces trois milliards d’hommes qui aujourd’hui gagnent moins de 3 euros par jour, ce qui augmentera les débouchés pour les produits manufacturés, les services, etc.
  Scénario qui suppose que la « bourgeoisie intelligente » (les entrepreneurs ? les hauts fonctionnaires ?) ne soit plus fascinée par les hochets et les blagues des financiers, etc.

  On rêve. Mais notre actualité c’est le renforcement des oligarchies et de leur ordre ancien, puisque leurs lois, leurs armées et leur presse et leurs idées préconçues règnent toujours sans partage.
  La population agricole, dans certains pays, diminue en pourcentages, alors que les terres sont sous-exploitées ou pas exploitées. Un certain nombre de gens lorgnent sur ces immenses terres qui représentent 70 à 80% de la totalité des terres.
  Malgré des espaces à forte densité de population, beaucoup de terres sont disponibles pour l’élevage ou la culture. Ces terres étaient collectives ou familiales, la tendance à la propriété individuelle ou familiale s’est dessinée dans beaucoup d’endroits, mais les codes ruraux qui sont décidés actuellement en Afrique, - la banque mondiale l’a encouragé - poussent à la privatisation de ces terres sous-exploitées ou inexploitées. Il suffit que le gouvernement ait un accord avec les Chefferies locales ou les autorités locales, il pourra ensuite les donner en concession, voire les vendre à des investisseurs internationaux qui fabriqueraient alors en Afrique, une agriculture sur le modèle sud-américain ou sud-africain, une agriculture capitaliste et sahélienne.

  Certains capitalistes se disent qu’en Afrique, au prix où sont payés les produits agricoles, la production est plafonnée ou s’effondre, les revenus des paysans sont assez bas pour qu’ils deviennent corvéables à merci, comme les minifundistes d’Amérique latine. Ils pensent faire des investissements fantastiques pour faire un agrobusiness exportateur.
  Les Chefs d’états africains se réjouissent de telles perspectives d’enrichissement rapide. D’autres souhaitent également que les paysans deviennent propriétaires. Mais si la privatisation est faite sans protéger les paysans africains, ils vendront tous leurs terres avant de mourir de faim ou avant de partir à l’étranger. Ce sera un désastre. Par contre si l’agriculture et la tenure des paysans étaient protégées, comme cela a été le cas le cas pendant 20 ans en France, la situation sera différente.

  Où trouver la puissance qui défera ces puissances sans les remplacer ?
  Comment échapper à la répétition du même ?
  Quelles impuissances seront assez puissantes pour défaire les puissants ?




La crise alimentaire et la crise, épisode 1 - neuf millions de personnes par an meurent de faim
La crise alimentaire et la crise, épisode 2 - des prix de famine
La crise alimentaire et la crise, épisode 3 - les trucages, l’arrogance, la mort, les réformes

La fracture agricole et alimentaire mondiale. Nourrir l’humanité aujourd’hui et demain par Marcel Mazoyer et Laurence Roudart

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Un entretien à propos de ce Journal avec la rédaction de YonneLautre.




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