1.
Avec Benoît Jacques et pour lui j’ai écrit Chat ! comme le début d’une suite de sept métamorphoses pour les petits.
Métamorphoses – celles des légendes : Junon jalouse métamorphose Callisto en une ourse, d’apparence féroce mais qui cependant erre seule dans la forêt, toujours timide et douce.
Soi changé en autre, lors, on imagine : l’autre changé en soi.
Pour les petits – des histoires à lire entre parent et enfant : le parent peut se prendre pour l’enfant, l’enfant peut se prendre pour le parent, tous deux peuvent se prendre pour le chat.
Après Chat ! la deuxième métamorphose sera Vers de terre ! la troisième, Mouettes !
Chat ! – c’est ce jeu de cour de récré tel que je m’en souviens : je te cours après, je te touche, tu t’arrêtes net, tu ne bouges plus, tu es changé en pierre.
Alors on peut inventer des histoires où ce serait : tu es touché, tu es changé, tu vis dans une nouvelle mobilité, une nouvelle allure. Ralenti comme un humain dans l’eau. Pris comme une libellule dans l’ambre.
On laisse le temps, même minuscule, même fragments d’instant, faire son travail. Les microsecondes ou les heures que prend la métamorphose de plume en poil, d’oiseau en humain. Du temps. De la place, de la plage dans les pages. De même l’écriture laisse de la place au dessin – à ce que je ne sais que fera Benoît.
C’est comme la poésie : entre deux strophes il y a du temps et de la place. Entre deux strophes, chacune comme un univers qui s’éloigne sans cesse de tous les autres, il y a toujours un espace qui quand même lie les strophes de sorte qu’elles sont toujours en éloignement et rapprochées.
On laisse de la place. On ne sait pas. On rêve.
2.
Je n’ai pas encore écrit Vers de terre !
Ce sont seulement des notes pour.
3.
Le meilleur des rendez-vous : celui qu’on ne rate jamais.
Je me souviens très bien, j’étais en colonie de vacances, quel âge ? Disons dix ans. Il y avait une pelouse qui montait, j’y étais seul enfin, à chaque fois que j’y venais et quel que soit l’endroit il suffisait de creuser pour rencontrer d’abord un puis beaucoup de vers de terre. Je me demandais pourquoi.
Je pouvais les regarder cent-sept ans, je ne me lassais pas ; eux non plus ; ils s’efforçaient ; leur effort, leur enfoncement dans le sol toujours était comme dans ma rêverie l’enfoncement d’une question la même toujours. J’étais sûr que je trouverai un jour mais je ne saisissais pas encore la question. J’étais sûr que je trouverai la question et le reste ensuite. Je m’agitais beaucoup intérieurement.
Treize Notes pour Vers de terre ! données à Valérie Rouzeau pour le n°10 de sa revue, Dans la lune.
Elles sont reprises ici en quatre pages.
Présentation & sommaire
Page deux ; notes 4 et 5.
Page trois ; notes 6, 7, 8 et 9.
Page quatre ; notes 10, 11, 12 et 13.